Lorsqu’Edouard Loubet a obtenu ses étoiles en 95 et 99, la cérémonie du Michelin ne ressemblait pas à ce qu’elle est aujourd’hui. Toujours positif, le chef de Capelongue nous donne son sentiment sur la manière dont les macarons ont été annoncés cette année, réconforte les déçus et nous assure de sa fougue increvable.
« J’ai trouvé ça pas mal. C’était un peu excitant de découvrir les étoiles en même temps qu’eux. Alors bien-sûr, c’est un peu délicat parce-que j’en connais qui la veille étaient dans le doute, dans la peur de ne pas avoir fait les bons choix notamment en terme d’investissements. Mais cette nouvelle formule est dans l’air du temps. Toutefois, il aurait fallu aller jusqu’au bout : une fois qu’on avait réuni tous ces chefs en veste qui sont venus des quatre coins de France, il ne fallait pas les laisser repartir comme ça. On aurait dû prendre une grande photo de famille, cela aurait fait du bien à l’ensemble de la profession. Là, le Michelin a sans doute eu une bonne idée, mais il en est aux prémices d’une bonne recette qui n’est pas encore aboutie. »
L’appel de ses pairs
« J’étais heureux pour Marc Veyrat qui nous a montré combien, toute sa vie, il n’a marché qu’à la passion. J’ai été très ému pour Christophe Bacquié, pour Magali et Jean Sulpice, mais aussi pour les premières étoiles. C’est un grand moment. Quand on est passé par là, on sait ce que c’est. C’est un grand moment qui salue le travail, donne l’humilité et renforce la motivation.
Il y a 20 ans, ça ne se passait pas comme ça : le guide sortait et on était appelé le jour-même par l’un de nos pairs pour nous apprendre qu’on avait une étoile. On nous réunissait ensuite un mois plus tard pour la photo officielle. En 1995, c’est Monsieur Paul qui m’a appelé : « Bravo le Mauriennais, le turbulent de la cuisine ! Continue comme ça ! ».
Puis ce fut Bernard Loiseau pour ma deuxième en 1999. J’avais 29 ans, j’étais le plus jeune cuisinier à son compte doublement étoilé : c’est formidable d’avoir alors un grand chef que l’on admire beaucoup qui prend le temps de nous passer un coup de fil pour nous dire « ne lâche rien ! ».
Patience et travail
Seul deux étoiles du Vaucluse, salué Cuisinier de l’année 2011 par le Gault&Millau (5 toques et 19/20 en 2018), Edouard tient bon la barre de la Bastide et la Ferme de Capelongue : il continue d’avancer et sa cuisine très personnelle poursuit sans relâche son hommage aux herbes cueillies sur les sentiers du Luberon.
« Pendant des années, je suis monté au Michelin ne sachant pas si j’aurais quelque-chose mais je n’ai jamais regretté d’y être allé : j’ai toujours vécu sur ces journées particulières des moments de partage, de communion de notre métier, avec des échanges très enrichissants. J’avais serré la main de Michel Guérard ou de Paul Bocuse et rien que pour ça, je n’ai jamais pensé que ça ne valait pas le coup ! Je crois qu’il faut y aller en se disant : « Je n’aurai rien, et si jamais j’ai quelque-chose, tant mieux » et profiter de ces moments tous ensemble. »