En complément de l’article paru dans la revue semestrielle Le Cœur des Chefs Numéro 16 (Automne/Hiver 2024), nous vous livrons ici la version longue de nos échanges avec Aurélien Gransagne (Maison Serge Vieira à Chaudes Aigues) et Laëtitia Visse (Restaurant La Femme du Boucher à Marseille). Tous deux clients Rougié 2024, ils témoignent de la côte de l’ingrédient foie gras sur les tables gastronomiques et dans les bistrots, et nous confient leurs recettes.
Ces chefs nous le disent : Le foie gras a toujours la côte. Et même si les clients l’apprécient toujours sous une forme traditionnelle, ils aiment aussi que l’ingrédient se réinvente sur le passe des chefs inspirés, dans les bistrots ou les restaurants gastronomiques. Laëtitia Visse (Restaurant La Femme du Boucher à Marseille), et Aurélien Gransagne, (Maison Serge Vieira à Chaudes Aigues) nous confient leurs recettes de foie gras de la Maison Rougié. Alors, poêlé ou en terrine ?
Aurélien Gransagne (Maison Serge Vieira) : Un foie très actuel
« Le foie gras était réservé aux grandes occasions. Aujourd’hui, on le déguste plus souvent, sans attendre le nouvel an. C’est un ingrédient qui a toujours la côte auprès de nos clients, mais ils ont envie de découvrir des choses différentes. Ils sont heureux quand on les bouscule un peu dans notre manière de le cuisiner. On tente de les surprendre en allant sur le registre de la légèreté. Nous faisons souvent un foie gras poêlé ou grillé sur lequel on vient verser un bouillon très parfumé, qui le rafraîchit. On aime aussi travailler sur les textures : couper très fin un foie gras en terrine puis réaliser des pétales, cela change totalement sa consistance, donc sa dégustation. C’est un produit que tu peux travailler de plein de façons différentes, et c’est ce qui le rend amusant. »
Recette racontée, par Aurélien : « Foie gras de canard poêlé de la Maison Rougié, petits ris de Manziat, haricots verts et condiment tomate«
« On travaille des petits haricots secs avec une peau très fine, les petits riz de Manziat, une ancienne variété que Laurent Janaudy a réussi à sauver. On les garde entiers, comme une petite salade, sauf une partie qui est mixée comme un houmous avec un peu de piment, un petit mélange d’herbes bien assaisonnées et citronnées et des zestes d’orange. On y ajoute une petite salade de haricots verts quand c’est la saison. Et surtout, on garde le bouillon de cuisson des haricots qu’on a tomaté, et l’on y ajoute pas mal d’herbes, notamment de la sarriette. On vient verser au service ce bouillon très parfumé et légèrement acidulé sur l’escalope de foie poêlé. On y ajoute un petit condiment tomate, très réduit et bien rouge, et ça fonctionne bien ! »
Aurélien Gransagne (Maison Serge Vieira)
La cuisson du foie poêlé
« On va d’abord le pré-cuire quelques minutes en sous-vide avec son assaisonnement puis le laisser maturer comme ça pendant 24 heures, ce qui permet à son assaisonnement de parfaitement s’infuser. Cela modifie sa texture, aussi. Et après, on le passe sur une poêle chaude, légèrement fumante mais pas plus. Attention, il ne faut pas le brûler non plus ! Dès qu’il est coloré, on le met sur une petite grille pour que le gras s’égoutte bien, mais en général, il n’y en a presque pas. Et après, on le termine au four gentiment jusqu’à ce que la cuisson soit optimale. C’est l’histoire de deux ou trois minutes à 90 degrés : cela suffit pour avoir que l’inertie permette à la température d’atteindre le cœur. Ensuite, un glaçage au pinceau (tomates, soja et miel), pour lui donner une pellicule bien brillante et lui donner une nuance d’assaisonnement supplémentaire. Et enfin, un petit coup de salamandre ! »
Le foie gras grillé de Serge Vieira
« Il y a quelques années, Serge avait fait un foie gras grillé dans le même genre. On partait d’un fond blanc pour réaliser un bouillon rafraîchi à la coriandre et à la menthe, bien infusé, parfumé au gingembre et au citron vert, avec des petites nouilles de riz. L’escalope était cuite sur le grill à charbon et on avait réalisé une garniture adaptée au début de la saison avec différentes variétés de choux, (chou-rave, komatsuna, pak choï…) et quelques trompettes de la mort. »
Aurélien Gransagne, (Maison Serge Vieira à Chaudes Aigues)
Le foie suit la saison à Chaudes-Aigues
À la Maison Serge Vieira, le menu change à peu près toutes les trois semaines. « Un plat n’a pas une durée de vie très longue chez nous ! », explique Aurélien Gransagne. « On a fait celui-ci lorsque les premiers haricots verts sont arrivés sur le marché de Rodez. Juste avant, on travaillait un plat autour des mange-tout, et quand la saison s’est terminée, on a attaqué les haricots verts. Et ensuite, on l’a décliné avec les fèves. L’an dernier, au mois de septembre, nous avions imaginé un foie aux figues rôties et figues fraîches, avec un lait d’amande très léger aux graines de courge que l’on venait verser sur l’escalope poêlée. Ce n’est jamais vraiment le même plat, mais en même temps, il y a toujours une trame qui nous guide. »
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Laëtitia Visse, Restaurant La Femme du Boucher à Marseille
Selon la cheffe de La Femme du Boucher à Marseille, il y a deux écoles : les puristes du foie gras qui vont l’aimer tel quel, juste assaisonné et sans alcool, et ceux qui apprécient que l’on sorte des sentiers battus. Ce qui est sûr, c’est que son restaurant est un terrain de jeu idéal pour ce produit résolument contemporain.
« Ces propositions originales le rendent à la fois plus digeste et plus actuel. J’en sais quelque chose, car dans mon restaurant, les préparations charcutières dont le foie gras sont des savoir-faire qui reviennent sous les feux de la rampe. Le retour du pâté-croûte a également accéléré son retour. Actuellement, je suis en train de travailler sur une ballotine, oreilles et pieds de cochon, foie gras et confit de canard. »
Yves Camdeborde m’avait prévenu : “Ma cuisine est parfois à la mode, parfois ringarde. Pourtant moi je n’ai pas bougé“, me disait-il. Cela m’a rassurée ! »
Laëtitia Visse, Restaurant La Femme du Boucher à Marseille
Un ingrédient accessible
Le foie gras est un symbole de la cuisine française, aussi à l’aise sur les tables gastronomiques qu’au bistrot. « C’est un vrai monument, en France et à l’étranger », selon Laëtitia. « Il se suffit à lui-même et en même temps il amène un plus indéniable à une recette. C’est un produit d’exception mais qui, lorsqu’il est marié à d’autres ingrédients moins onéreux, devient très accessible. Par exemple, la terrine Lucullus de Valenciennes est une terrine de foie gras et langue de bœuf confite. Et en Bourgogne, mon beau-père, Philippe Delacourcelle, (Restaurant Boisrouge ), réalise une terrine de foie gras aux lentilles et brunoise de carottes, mise sous presse et servie avec un chutney de gingembre. »
« Le foie gras offre des milliers de possibilités mais reste un ingrédient très technique qui permet de valoriser un vrai savoir-faire de cuisinier, dans les valeurs de la gastronomie d’aujourd’hui. »
Laëtitia Visse, Restaurant La Femme du Boucher à Marseille
« C’est fou de voir combien les gens sont attachés à ce produit. Avec la Maison Rougié, la qualité est au rendez-vous avec des gammes différentes qui s’adaptent à nous : on sent que l’équipe réfléchit à la vie du restaurateur. »
Le Trophée Jean Rougié : Le témoignage de Laëtitia Visse, Restaurant La Femme du Boucher à Marseille, membre du jury 2024
Incontestablement, le Trophée Rougié est entré dans la cour des grands, véritable tremplin de haut vol pour les jeunes à fort potentiel. Sur le podium 2024, le canadien Erik Hansen a été coaché par un ancien d’Alain Ducasse qui a longtemps travaillé au Spoon, le second était à Granite chez Tom Meyer et le troisième à Baumanière avec Glenn Viel. « C’est la seconde fois que je suis au jury » , témoigne Laëtitia, « et je confirme que le Trophée Jean Rougié est devenu un concours qui compte et s’est ouvert à l’international. Nous avons eu cette année des candidats extrêmement déterminés et des notes serrées, où tous se suivaient à quelques points près. »
« Le trophée Rougié est devenu un concours qui compte. »
Laëtitia Visse, Restaurant La Femme du Boucher à Marseille
L’apprentissage en lumière
Mais au-delà de sa réputation, le concours se distingue par sa mise en valeur des duos “élève/professeur“ : « Le Trophée Jean Rougié fait rayonner l’apprentissage de nos métiers », poursuit Laetitia. « Je trouve très touchant l’investissement des candidats qui sont fiers de représenter leur établissement, et l’engagement des enseignants : Que ce soit Damien l’an dernier ou Frédéric, le professeur de Mathis cette année, tous les deux m’ont dit la même chose : “J’ai voulu le faire parce que j’avais un apprenti exceptionnel ! “ »
Où les trouver ?
https://www.lafemmeduboucher.fr
Copyright photos : Maki Manoukian pour le portrait de Laëtitia Visse, et Alexandra Battut/Agence Camille Carlier pour Aurélien Gransagne.
Les 150 ans de la Maison Rougié
À l’aube de ses 150 ans, la maison Rougié s’est toujours engagée pour la qualité de ses produits et accompagne les chefs du monde entier. Fondée en 1875 à Sarlat, elle a su traverser les époques, évoluant sans cesse sur son offre, toujours en garantissant l’excellence de ses produits. Près de 400 fermes familiales situées dans le Sud-Ouest et dans l’Ouest de la France permettent une maîtrise totale de la qualité des élevages. Les canards Rougié sont nés, élevés (sans traitement antibiotique) et préparés en France. Les foies gras sont travaillés minutieusement pour garantir un minimum de taux de fonte. Ils sont déveinés à la main et sélectionnés par des Femmes et des Hommes engagés. https://pro.rougie.fr