Ludovic Turac, huit ans après avoir repris Une Table au Sud à Marseille, redémarre à zéro. Peu d’éléments subsistent de l’ancien restaurant et de la cuisine. Même les numéros de tables ont changé. Mais surtout, le temps du Covid a été mis à profit pour cogiter et remettre à plat son identité culinaire. Avec un peu de recul, il a décidé de la manière dont il allait gérer ses signatures passées et emmener ses clients dans un nouveau voyage personnel. Sortez vos passeports.
On s’est arrêté des mois, on a hâte de reprendre. C’est comme une ouverture parce qu’on repart à zéro, alors tu es un peu fébrile. Le service commence, tu es bien dedans, le kiff total. Une évidence. Et là, tu te dis : “Je suis vraiment fait pour ça !“
Ludovic Turac, training avant réouverture, juin 2021.
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Choisir son propre décor
Pour la première fois, il a choisi chaque élément. Abattu des cloisons, ouvert son espace, réorganisé son accueil, imaginé ses propres couleurs et trouvé ses centres de table chez la potière Chloé (Atelier de la Lézarde à Marseille). Ses poulpes et ses poissons de terre cuite brute (assez incroyables), tranchent avec contraste sur les murs bleu nuit et les aplats d’or qui vont refléter les lumières du port le soir venu. Un peu lassé des architectes qui signent les ambiances des restaurants sans y cuisiner eux-mêmes, Ludovic Turac avait besoin de se réapproprier son propre lieu. Mais surtout, de repartir à zéro sur sa cuisine.
Le temps du Covid a permis de cogiter
Comme beaucoup de chefs, le recul imposé a permis de prendre du temps pour travailler son redémarrage. Et là, on repart d’une page blanche. Pas exactement, puisque le menu Marseille garde une trace de quelques plats connus même s’ils n’ont plus rien à voir. Longtemps, les marseillais ont fait l’éloge de la tartine d’aïoli d’Une Table au Sud (foccacia noire, brandade, copeaux de légumes). Une page est tournée, la tartine n’existe plus. Mais comme un clin d’œil, le plat réapparait dans l’assiette : visuellement, on y croit. Mais c’est un trompe-l’œil : la foccacia est devenue un morceau de merlu, glaçage noir/encre de seiche. Pour les habitués de longue date, les fidèles depuis 8 ans, c’est un private joke assez bluffant.
Le menu « Passeport »
Le plus dépaysant, c’est bien le voyage imaginé avec les produits d’ici et des goûts d’ailleurs : Ludovic Turac nous fait passer à table avec dans les mains notre passeport tamponné. Chaque étape à venir est illustrée d’un polaroïd : Ludo sur le marché de Jérusalem ou préparant un repas sur la plage du Carbet à Fort de France, autant de moments personnels qui ont fait naître des souvenirs gustatifs.
« De mes voyages, je me souviens… »
« Le jus d’une grenade dans les rues de Jérusalem, l’odeur de la viande fumée à Istanbul ou le Bao piquant de Bangkok, tant de saveurs indélébiles que je souhaite partager avec vous. »
Toujours en travaillant les produits de Marseille et de ses alentours, le chef est allé chercher dans ses souvenirs le goût de ces instants passés loin de sa ville et dont il est revenu nourri de nouvelles sensations.
Comme un fil conducteur, on garde cet art de vivre méditerranéen où l’on fête le partage des cultures culinaires, où l’on prend la liberté de se réapproprier avec gourmandise certaines découvertes dans une création plus personnelle. Ludo nous emmène, sans bouger de Marseille !
Les petites claques du jour…
- La crevette sauvage crue, sauces soja, coriandre et cacahuète.
- Etape Istanbul (ou comment rendre leurs lettres de noblesse aux keuftés de famille)
- La navette, mousse de fleur d’oranger prise dans des moules maison (Merci Clément Lessoud !)
- Le tiramisu Café/pesto de l’étape Alba (je me love encore dedans).