La saison, la saison… Les chefs nous rappellent que la mise en bocaux des légumes d’été pour les manger l’hiver est une des meilleures manières d’exploiter au mieux les ressources de son coin.
Parlons saison, donc parlons conserves !
Plusieurs échanges récents mettent à jour la nécessité de parler « conserves ». Les chefs se rebiffent sur la question et nous alertent sur l’exclusivité du frais exclusif car dans ce cas, on fait fi des méthodes de conservation naturelle. Il serait dommage d’oublier les techniques des anciens que l’on garderait actuelles uniquement pour les confitures. Si les tomates ont une saison courte, il faut d’une part en profiter lorsqu’elles sont là, mais également exploiter leur extrême maturité en fin de course pour les préparer en bocaux. Et servir en hiver un plat avec une sauce tomate, ce n’est pas « hors saison » : c’est une stratégie de réflexion annuelle sur l’utilisation intelligente de ses ressources et de ses produits locaux tout au long de l’année.
Saumure et pickles…
Certains irréductibles poursuivent la mise en « Parfait » de leurs fruits et légumes, mais ce sont souvent des particuliers : les chefs ont-ils gardé cette technique au restaurant ? Aujourd’hui ils s’y remettent. Certains n’avaient jamais arrêté, d’ailleurs. Michel Guérard et Arnaud Donckele en parlent ensemble et nous proposent de ne pas l’oublier. Aujourd’hui c’est même une tendance à revendiquer : fruits au sirop, citrons au sel ou oignons en pickles vinaigrés font aussi partie d’une mise en place organisée des semaines à l’avance.
Notons ces bocaux d’agrumes au dessus du passe de la pâtisserie de Guillaume Godin chez Arnaud Donckele à la Vague d’Or (Résidence de la Pinède) : Citrons Bergamote, Mikans, kumquats, Mandarines Chinotto et Berlugane…
Parlons des bocaux de Nicolas Bottero qui s’est offert un magnifique autoclave pour faire ses conserves de fruits et légumes au Mas Bottero de St Cannat. On assume alors le côté épicerie fine du chef qui vend ses propres conserves à emporter.
On note aussi le retour aux sources de la lacto-fermentation dans les travaux de Geoffrey Poesson illustrant ainsi son virage vers une cuisine très saine à la Badiane (Ste Maxime) : tous les légumes bio y passent, et bientôt sa « Bouillabaisse végétale » sera proposée en bocaux pour poursuivre l’expérience à la maison.
Pourquoi fait-on moins de conserves ?
Selon Vincent Ferniot, « la surgélation a remplacé le bocal comme mode de conservation privilégiée. » Le créateur de « Boco » a créé une carte ou chaque plat est servi en bocal de verre et le dressage est tout à fait tendance. En revanche, pas de plats en conserves chez Boco et la Dluo est courte : « On pasteurise parfois, tout au plus, mais on ne stérilise pas : je trouve que cela serait préjudiciable aux textures notamment. Mais on cuit en bocaux, ça oui ! Par contre, je fais moi-même mes bocaux de légumes et je ne me sers que de conserves de tomates pour mes sauces. »
Il ressort donc que les légumes et fruits en conserves sont plutôt encouragés en tant qu’ingrédients mais le goût et les textures pâtissent de la stérilisation. Reste à voir si l’utilisation hors saison de ces conserves d’été pourra se revendiquer et se confirmer sur les belles tables.
En témoigne l’opération « Garde-Manger » organisée à Paris du 13 juillet au 28 août dans le cadre du festival #Ensemble à la Cité de la Mode qui lance un appel aux dons aux professionnels (chefs, épiceries fines…) qui peuvent envoyer une conserve afin de construire un mur de bocaux. Ceux-ci seront vendus aux enchères le 25 août sous la houlette bienveillante du parrain Michel Troisgros au profit de l’association « Le Récho ». Si vous souhaitez envoyer un bocal, écrivez à Lina : l.tornare@orange.fr.