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Filière foie gras : Se relever après la crise

by Anne Garabedian

Venir à Sarlat, c’est pour Le Cœur des Chefs un symbole de notre engagement pour soutenir la filière foie gras, durement impactée par la crise de la grippe aviaire. On s’est posé longuement avec Sébastien Doat, éleveur à Nogaro dans le Gers, très actif dans la coopérative des quatre cent cinquante éleveurs qui fournissent la Maison Rougié. Nous voulions prendre des nouvelles des producteurs et leur demander comment les aider. Sébastien nous donne les détails du plan de bataille décidé collégialement par les professionnels face à la grippe aviaire.

Se relever 

« On va le mieux possible dans cette situation, parce qu’on va de l’avant. Depuis la première épidémie de 2016, nous avons changé de notre manière de travailler et il a fallu accompagner les exploitations dans ce sens. Nous avons énormément investi pour sécuriser les élevages, créer des abris pour les périodes à risques, mettre en place des normes d’hygiène et de bio-sécurité qui ont renforcé le professionnalisme des éleveurs et le bien-être animal. Nous faisons face aujourd’hui à une nouvelle crise, liée à un flux migratoire bien connu de goélands, de canards et de cygnes notamment. Onze types d’oiseaux ont été identifiés porteurs de la grippe et responsable de cette nouvelle contagion. Il faut donc protéger nos élevages pour éviter la propagation. »

Un plan qui marche

« Au sein de la coopérative, nous avons mis en place un plan très efficace : avec derrière nous quatre ans de relevés de données, nous savons exactement où se situent les communes où l’on note une récurrence sévère de la maladie et il y en a soixante-dix dans le Sud-Ouest, principalement situées dans les Landes. Cela s’explique par différents facteurs, tout d’abord par une zone géographique humide, une grande diversité de productions (des canards mis aussi des poulardes, des chapons…), et surtout, une grande population d’animaux dehors. Quand vous avez des millions de canards en plein air, pile au moment d’un flux migratoire, vous avez une bombe : la maladie se propage facilement. Et le virus saute de l’un à l’autre comme une puce.« 

Le plein air, mais pas en hiver

« Déjà, le fait de rentrer les animaux pendant l’hiver, (mais les laisser courir les autres saisons dehors) réduit considérablement les risques. Et pour tout vous dire, je préfère mettre mes animaux à l’abri sur une litière fraiche changée tous les jours et m’assurer de les protéger des conditions climatiques hivernales difficiles et éprouvantes. »

La décision collégiale des professionnels

Donc la meilleure solution était de n’avoir aucun animal sur ces zones « Adour » pendant la période à risque, soit du 15 décembre au 15 janvier : « Cela implique pour les éleveurs concernés de s’arrêter deux mois et demi avant et de reprendre avec le même délai d’inertie. Ce n’est pas facile, mais c’est la meilleure option, qui divise par huit le coût des abattages systématiques. Il n’y a pas photo, c’était une décision concertée puisque la coopérative est gérée par une gouvernance d’éleveurs « qui veillent au grain », c’est le cas de le dire. Nous n’avons pas hésité : Nous ne voulions pas revivre ce que nous avons vécu. »

« Comment nous aider ? Expliquez notre métier. Racontez la vraie vie d’un éleveur investi au sein de notre coopérative : il est présent au quotidien, il prend soin de ses animaux, de leur confort et de leur alimentation. »

SÉBASTIEN DOAT, ÉLEVEUR À NOGARO DANS LE GERS

Comment soutenir la filière ?

En posant cette question, je m’attends à ce que l’éleveur me dise : « Mangez du foie gras ! ». Mais c’est inutile : Audrey Estival (Maison Rougié depuis huit ans), me confie que 93 % des français sont toujours très attachés au foie gras et n’ont pas envie de s’en passer. Par contre, Sébastien explique que la filière est peinée par les attaques médiatiques qui mettent toute la profession dans le même panier : « Expliquez notre métier. Racontez la vraie vie d’un éleveur investi : Il est présent au quotidien, il prend soin de ses animaux, de leur confort et de leur alimentation. »

C’est chose faite. 

 « Nous avons deux zones de production, en Bretagne et dans le Sud-Ouest. Notre foie gras est 100% français, nourri au maïs français sans OGM. Nos exploitations sont souvent familiales et avec 30000 bêtes par an, un couple peut vivre de son métier. On s’adapte : de toutes manières, il faudra certainement vivre avec ce virus comme nous allons vivre avec le Covid. » 

Audrey Estival, Maison Rougié depuis huit ans.

À lire dans Le Coeur des Chefs Numéro 13 : « Le trophée Jean Rougié 2023 à Sarlat », remporté par Yassine Tahri.

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